Se repérer dans la jungle des Systèmes d’informations Achats
Livre Blanc :
Se repérer dans la jungle des Systèmes d’informations Achats
Une révolution dans toutes les organisations achats !
La dynamique économique actuelle fait souvent référence à la quatrième révolution industrielle (Industrie 4.0), qui reflète la tendance vers une automatisation, une numérisation et une utilisation accrue des nouvelles technologies digitales au sein des organisations. Les moteurs de l’industrie 4.0 sont doubles, à savoir le « client-pull » et le « technology-push ». D’un côté, la demande de développement de produits aux cycles plus courts, le besoin de collaboration accrue entre acteurs, l’obligation de gestion efficace des ressources et la nécessaire flexibilité au sein de la chaîne d’approvisionnement plaide en faveur de la quatrième révolution industrielle. De l’autre côté, les développements technologiques, comme l’IoT, le traitement de données volumineuses (big data), le blockchain et l’intelligence artificielle (IA) poussent vers l’industrie 4.0.
Cette révolution a un impact particulièrement fort sur les achats car cette fonction peut être considérée comme un détecteur précoce des changements radicaux à venir prochainement. L’évolution de l’industrie 4.0 incite les organisations achats à moderniser des Systèmes d’Informations achats (SI achats) pour faire progresser leur performance. Le caractère stratégique d’un Système d’Informations Achats a été mieux compris au cours de la dernière décennie. Il est clair maintenant que le bon choix d’un SI achats apporte un avantage concurrentiel à l’entreprise, et en ce sens revêt une dimension de choix stratégique.
Or, même les organisations les plus matures peinent à identifier des solutions répondant précisément à leur besoin dans la jungle des éditeurs de SI achats concurrents. Au vu du nombre grandissant de SI Achats qui apparaissent sur le marché, on se questionne sur la façon d’y voir clair dans cette offre pléthorique : depuis l’offre des grands éditeurs comme Coupa ou Ivalua, aux start-ups offrant des solutions prometteuses et plus agiles mais aux fonctionnalités limitées. L’absence de modèle établi pour évaluer et classer les solutions en fonction de leur maturité « Industrie 4.0 » n’aide pas les décideurs achats à faire le meilleur choix.
L’enjeu est donc de taille. Le présent livre blanc vise à apporter un angle de vue original sur les facteurs de choix d’un SI achats, à l’attention des décideurs achats, des futurs utilisateurs, ou des DSI. La raison d’être de cette étude est d’identifier les atouts, limites et contraintes des SI achats, en s’affranchissant des sur-promesses marketing, pour pouvoir mettre régulièrement à disposition des décideurs une vision objective du marché.
Une offre complexe et fragmentée
L’introduction des premières suites achats date des années 90, quand les grands ERP ont commencé à intégrer des fonctions de gestion des transactions dans leurs systèmes. SAP par exemple pouvait couvrir des éléments de suivi de facturation, de référencement fournisseur, de validation des réceptions. Mais depuis ces années, les départements achats ont vu émerger pléthore d’offres de plateformes web et de suites logicielles leur offrant de gérer plus efficacement leurs activités achats.
Aujourd’hui, la fragmentation du marché est telle que les Directeurs des Achats peinent souvent à s’y retrouver parmi les grandes tendances : d’une part les ERP transactionnels qui investissent toujours pour renforcer leur offre en matière d’approvisionnement (acquisition d’Ariba par SAP, Oracle Fusion Procurement), d’autre part les offres de suites complètes qui permettent de traiter le sourcing et les activités transactionnelles du type suivi de facturation (Coupa, Ivalua…), et enfin les solutions achats spécialisées provenant de start-ups, moins connues, qui adressent une partie uniquement du processus achat, mais de façon experte.
Dans ce marché, certaines solutions étendent en permanence leur couverture fonctionnelle rendant la lecture instantanée des fonctionnalités difficiles (comme Tradeshift qui intègre l’automatisation des factures). D’autres solutions disparaissent du jour au lendemain ou sont renommées après des opérations de fusion (Jaggaer, Corcentric / Determine; Proactis,…). Sans oublier les nouveaux entrants sur le marché provenant d’autres domaines fonctionnels qui tentent de percer les processus achats (Kimoce, Salesforce, …) ou l’offre très pertinente et moins chère venant d’autres pays (Inde notamment). Bref, la nécessité d’y voir clair n’est plus à démontrer.
C’est pourquoi, alors, il est légitime de se demander :
- Comment choisir un SI Achats adapté aux besoins de mon organisation achats ?
- Quelles sont les différences majeures et les nuances entre les SI Achats disponibles sur le marché ?
- Comment obtenir une classification objective de tous les SI Achats, loin du déclaratif des éditeurs ?
Des modèles de classification des SI Achats existent déjà
Classifier les SI achats nécessite de décrire, de normer et de comparer ces systèmes. Le but pratique pour les décideurs achats est d’avoir une vision comparative des solutions existantes, afin de faire le bon choix, en toute connaissance de cause, avant d’investir dans une solution.
Les modèles de maturité ou les matrices quadrant sont des instruments adéquats pour un tel exercice. Ils sont couramment utilisés pour identifier des caractéristiques communes entre des suites logicielles ou des systèmes d’information. Ces modèles comportent souvent deux axes, afin d’affecter une position selon deux grandes dimensions critiques.
En plus de fournir l’image statique d’une situation donnée, les modèles de classification sont censés fournir un guide dynamique pour faire progresser la maturité de son organisation achats jusqu’au niveau désiré, via l’acquisition d’un SI Achats. Chaque élément du modèle peut être évalué par une liste de caractéristiques représentatives et ensuite positionné sur un diagramme dont le but est la représentation visuelle du résultat et la comparaison des solutions entre elles. Cette démarche nécessite donc une importante collecte de données pour chacun des éléments considérés.
Concernant les SI achats, quatre modèles de classification sont connus de la presse spécialisée et publient régulièrement des classifications de SI achats. Les détails de ces modèles sont présentés page suivante :
Nécessité d’établir un nouveau modèle
Compte-tenu de l’absence de transparence dans le système de classification des modèles existants, le principe de notre démarche est de construire notre propre modèle, en corrigeant cette première faiblesse. La neutralité et l’objectivité d’une classification de SI Achats doivent être crédibles pour que les décideurs achats puissent se reposer sur un outil d’aide à la décision fiable. Ceci passe par la diffusion sans filtre de la liste des critères.
De plus, un modèle classifiant des SI doit être représentatif de la richesse et de la vitalité d’un segment de marché. Dans le domaine des SI Achats, de nombreuses solutions émergent partout dans le monde : la dynamique des nouveautés est flagrante en Inde par exemple. Cette vitalité est historiquement forte aux USA mais ralentit, alors que nous constatons que de nombreuses start-ups émergent et proposent des solutions innovantes. Nous sommes convaincus de l’intérêt de mettre en valeur cette vitalité, ce que les modèles existants font peu.
Une autre motivation à proposer un nouveau modèle vient du fait que les modèles existants présentent souvent les performances des SI Achats d’un point de vue éditeur, diffusant beaucoup de sur-promesses. La littérature professionnelle relaie largement ces déclarations institutionnelles des éditeurs, et ceci est peu propice à la différentiation des solutions. Un point crucial pour un décideur achat est d’aller au-delà des déclarations des éditeurs pour savoir si une fonction affichée est objectivement performante, et pour toucher du doigt comment ces solutions ont été construites. Ce besoin d’objectivité impose de considérer de multiples sources pour affecter une note à chaque solution (utilisateurs, éditeurs, intégrateurs, voire tests).
Enfin, un modèle de classification des SI Achats doit être pertinent et correspondre aux enjeux actuels et futurs des organisations achats, dans une logique métier, mais aussi d’alignement avec la stratégie de l’entreprise. Les critères de classification des SI Achats doivent couvrir l’ensemble des activités d’une organisation achats, du sourcing jusqu’à transaction, via le SRM et l’alignement stratégique. Cette évaluation exhaustive de la couverture fonctionnelle est nécessaire pour venir enrichir la connaissance des SI Achats considérés.
Proposition d’un nouveau modèle de classification des SI Achats
Notre modèle répond donc à trois objectifs principaux :
Construire un modèle qui sera mis à jour dans la durée, pour s’inscrire dans une logique de surveillance des tendances du marché. | Apporter une connaissance objective (qualité/défauts) des différentes solutions, en se basant sur une notation venant de multiples sources, pour révéler les atouts, limites et contraintes des solutions répertoriées | Etablir un langage clair et compréhensible par les décideurs achats, souvent non-experts en systèmes d’informations. |
La création de ce nouveau modèle s’est déroulée en deux temps. D’abord, la consultation d’un cabinet de conseil en management expert du choix et de l’intégration de SI Achats, AXYS Consultants, via une série d’interviews de consultants experts. Les missions qui sont confiées à AXYS portent souvent sur l’accompagnement de ses clients dans la recherche du SI Achats apportant le meilleur avantage compétitif, le mieux aligné sur les attentes du client. Son expérience, le nombre de projets conduits et la vision du marché qu’ont les consultants AXYS ont permis de développer les fondements de ce nouveau modèle.
Ensuite, la sphère académique et notamment les publications les plus récentes relatives à l’industrie 4.0 ont complété la démarche. Des ouvrages comme Knowledge Management and Industry 4.0 (Bettiol et al., 2020), mais aussi des articles tels que Making sense of the impact of the internet of things on Purchasing (Legenvre et al., 2019) ont permis de développer le modèle. Enfin, des liens étroits entre la chaire Audencia « Achats et Innovation digitale » et la chaire de Twente University « Chair of Technology Management » ont contribué à identifer les dernières avancées académiques en matière d’impact de l’industrie 4.0 sur les fonctions achats.
Trois dimensions fondamentales pour établir une classification pertinente et pragmatique
Il a résulté de ces travaux d’investigation terrain et de recherche académique la mise en évidence d’un certain nombre de critères nécessaires à la l’évaluation d’un SI Achats. Ces critères ont été organisés selon 3 axes majeurs :
AXE 1/ Couverture fonctionnelle : le SI Achats doit refléter les besoins opérationnels actuels et futurs de l’organisation, ce qui semble une évidence. Les fonctions de bases couvrent le processus achats, du sourcing au suivi de la transaction, et le management de la relation fournisseur. Mais de nouvelles fonctions apparaissent, comme le scouting des innovations, l’automatisation du tracking des factures, la robotisation des achats non critiques, etc. Ces fonctions doivent être prise en compte dans notre évaluation. La difficulté est d’intégrer les dimensions industrie 4.0, ce qui apporte la vision des organisations de demain.
AXE 2/ Facilité d’usage et d’intégration: le SI Achats doit être analysé sous l’angle des utilisateurs, avec les dimensions de facilité d’usage, de facilité d’intégration, de maintenance, de formation, de mises à jour, etc. Nous évaluons ici sa capacité à s’adapter aux besoins spécifiques du client notamment eu égard aux évolutions rapides de l’industrie 4.0. Cette dimension inclut notamment le niveau de customisation aux systèmes existant du client, la facilité d’utilisation au quotidien pour un acheteur-utilisateur (ergonomie de l’interface par exemple), la vitesse d’intégration aux systèmes existant dans l’entreprise (ERP divers comme SAP, autres SI Achats, etc.), la puissance du service support, etc.
AXE 3/ Stratégie technologique : le SI Achats doit être évalué sous l’angle de sa performance technologique, dans le sens où la puissance du moteur qui l’anime doit être connue et évaluée. Cette troisième dimension jugée critique dans le choix d’un SI achats reflète la sophistication du SI achats en matière de technologie, d’innovation et des algorithmes embarqués. Il s’agit là d’évaluer le cœur du SI Achats, pour vérifier la performance des caractéristiques énoncées par le vendeur de la solution. Les critères évalués sont principalement la capacité de la solution à prédire des situations futures, à utiliser de l’intelligence artificielle pour piloter certaines tâches, à analyser des données complexes (analyse prédictive et prescriptive), à offrir un niveau élevé de sécurité dans le traitement des données.
Ces trois axes sont donc apparus comme primordiaux pour comparer les SI achats entre eux. Ils se déclinent en thèmes. Les thèmes sont les dimensions principales caractérisant les trois grands axes. Les thèmes reflètent l’étendue et la profondeur du modèle proposé, et sont eux-mêmes déclinés en critères permettant d’évaluer précisément chaque SI Achats.
Détail des critères de classification des SI Achats
Première publication du modèle : Q1/2021
La première publication du modèle ciblera 12 SI Achats existant sur le marché, dont la particularité est qu’ils sont tous édités par des start-ups, et peu connus par la plupart des Directeurs Achats. Notre objectif étant de démontrer le dynamisme de ce marché de SI achats, le meilleur angle de vue est de pointer les projecteurs sur des solutions jugées prometteuses par bon nombre d’experts, mais encore émergentes. C’est toujours à l’extérieur du cadre que l’on trouve les plus belles pépites, et nous souhaitons partager cela avec vous.
Le fait de cibler les solutions de ces 12 start-ups, et non pas les solutions les plus courantes, permet aussi de s’affranchir de l’immense littérature vantant les promesses des acteurs en place. Cette littérature parvient difficilement à cacher les influences diverses dont sont imprégnées les multiples articles à leur sujet. Tester notre modèle sur 12 solutions peu connues, c’est miser sur des informations fiables, quelquefois apportées par les entrepreneurs eux-mêmes.
L’agilité et la facilité de contact avec les acteurs de ces start-ups seront un atout pour notre évaluation des solutions. Nous accèderons ainsi au regard croisé des clients utilisateurs, des intégrateurs et des observateurs externes (experts). Il est important de valider cette première évaluation par de multiples sources, pour challenger les promesses des éditeurs, par un approfondissement de la matière disponible.
L’ajout des solutions plus connues sera fait dans un second temps, lors d’un recensement plus exhaustif. Ceci fera l’objet de publication régulières, une fois que la valeur ajoutée de notre modèle aura été validée. Notre volonté est donc de nous inscrire dans la durée pour faire en sorte que ce modèle s’enrichisse progressivement et que, à terme, on passe au crible non seulement le top 10 mais aussi le top 20, le top 50 des SI Achats.
Dans cette première évaluation, nous excluons donc la présence d’un SI Achats, dès l’instant où il n’y a qu’une seule source d’information disponible (souvent celle de la communication institutionnelle de l’éditeur). Le croisement du feed-back des clients utilisateurs, des consultants intégrateurs, voire des résultats d’un test de la solution constitueront les piliers de notre modèle. Chaque SI Achats sera passé au crible de l’évaluation multi-source, afin de challenger les promesses de l’éditeur. L’intégration d’un nouveau SI Achats dans notre évaluation se fera avec trois ou quatre sources qui viendront se confirmer, rendant la qualité de notre évaluation irréprochable. Ce niveau de maturité sera atteint progressivement.
Les 12 SI Achats sont révélés à la fin de l’article, page suivante.
Conclusion
Il n’y a pas de SI Achats idéal sur le marché, il y a un SI Achats adapté au contexte de l’entreprise utilisatrice, des enjeux en termes de métier, en termes de stratégie d’entreprise, d’investissement, et de performance de la fonction achats. Les organisations achats ont besoin d’avoir une connaissance fine du marché des SI Achats pour décider de leur stratégie digitale : connaitre le meilleur SI achats qui leur apportera un avantage compétitif, le mieux aligné avec le cadre et les attentes dans lesquels le projet se situera.
Nous avons constaté la vitalité et la complexité de ce marché des SI Achats, et nous avons été étonné par le fait que les modèles de classification existants ne reflètent pas cette dynamique. Ces modèles sont perfectibles, ils manquent de transparence quant à la méthodologie utilisée pour classifier les SI Achats. Les décideurs achats sont donc souvent désorienté dans leur choix de la solution qui répondra à leur besoin réel.
Notre modèle de classification des SI Achats contribuera à répondre à cette attente : apporter de la lisibilité, de l’objectivité par une classification des SI Achats. Pour l’instant nous sommes dans la phase de développement du modèle et du recensement des SI Achats.
Nous proposerons un modèle qui a des qualités intéressantes vis-à-vis du contexte d’innovation des SI Achats auquel les décideurs achats sont confrontés aujourd’hui, notamment l’adaptation aux dimensions de l’industrie 4.0. Nos premières recherches montrent déjà qu’il y a une richesse de nouveaux acteurs et d’innovations qui n’est pas révélée par les modèles dominants (Gartner, Forrester, Spend Matters, Cap Gemini), parce que notre recensement révèle une myriade d’acteurs qui ne sont pas scrutés et analysés par les grands observateurs de la planète.
Aussi, par souci d’objectivité, ce modèle de classification intègrera la connaissance d’acteurs divers : le point de vue acheteur-utilisateur, le point de vue éditeur, celui des intégrateurs qui ont déjà testé ou intégré des SI Achats, formé des utilisateurs. Le rôle de ce modèle sera d’aller très loin dans l’identification des tenants et aboutissants, des qualités intrinsèques et des défauts des solutions existantes. C’est à ce prix seulement que nous pourrons revendiquer l’objectivité de notre classification.
On s’inscrira dans la durée pour appliquer le modèle le plus largement possible, mais cela nécessite un travail important de collecte de données et de tests des solutions. Ce travail sera conduit par la chaire AUDENCIA « Achats et Innovations Digitale », et piloté par AXYS Consultants. Il amènera à la mise à jour régulière du recensement des SI Achats, de l’évaluation des solutions par le croisement des données de multiples acteurs-experts.