Comment reconnecter ses collaborateurs à l’entreprise ?
Télétravail : la solitude est-elle inéluctable ?
Comment transformer des heures d’écrans imposées à vos collaborateurs en une expérience positive ? Comment utiliser des évènements distance pour remobiliser vos collaborateurs, fédérer des équipes, résoudre un problème ? A l’heure du désamour des français pour le télétravail imposé et la prolongation de la distanciation sociale, nous partageons quelques pistes pour réussir à recréer du lien avec vos collaborateurs, issues de retours d’expérience récents.
La solitude, la difficulté à collaborer, la perte de lien social sont les principaux obstacles récurrents relevés par 40 % des collaborateurs de l’entreprise Buffer, une entreprise connue pour ne pas avoir de bureaux. En France, avec la prolongation de la crise sanitaire, ces obstacles deviennent insurmontables : 71 % des Français ne souhaitent plus être en télétravail selon un sondage récent de Yougov. Le manque de relation sociale est mal vécu, la déconnection avec l’entreprise fréquente.
Ce désamour des Français pour le télétravail après une très courte lune de miel est facile à expliquer en piochant dans le sondage de Buffer : travail collaboratif difficile, manque de communication, solitude… Saturation aussi. La multiplication des réunions improductives devant un écran, multiplication des sollicitations sur WhatsApp, les difficultés de connexion, la disponibilité obligatoire. Comme le relève l’OCDE, tous ces éléments créent outre une fatigue plus intense, une difficulté à être efficace et vont même jusqu’à « ralentir le processus d’innovation ».
Comment reconnecter ses collaborateurs à l’entreprise ?
La prolongation de la crise sanitaire contribuera sans doute à exacerber les dégâts. La difficulté à se retrouver dans les bureaux éloigne chaque collaborateur des sujets et de la connaissance, formelle et informelle. Le lien social s’efface et avec lui le lien à l’entreprise.
Pour les managers et les décideurs, les défis sont clairs : comment reconnecter et re mobiliser les collaborateurs aux enjeux de l’entreprise ? En miroir, les collaborateurs sont en attente d’initiatives managériales pour traiter ce mal-être.
Dans le fameux monde d’avant, ces attentes étaient traitées via des grand-messes annuelles et autres séminaires ou journées en plénières. Lors de ces temps collectifs en grand nombre, quelques ateliers, un peu de team building et une bonne restauration semblaient suffisant à renforcer facilement la cohésion du groupe.
Avec les règles de distanciations, ce type d’évènements est désormais proscrit et bien qu’ils soient plébiscités on n’ose pas les repenser en distanciel. Les organisateurs sont frileux car les risques d’ennui ou de problèmes techniques sont annonciateurs d’échec. Relever le défi est pourtant possible, voici notre retour d’expérience
L’ennui, l’ennemi n° 1
Si on vous disait que l’on peut organiser de grands moments collectifs à distance, et sans que les collaborateurs s’ennuient ou suivent vaguement derrière leur écran ? Créer un rassemblement 100 à 1000 personnes pendant une journée sans que personne ne décroche semble relever de la promesse intenable. Comment ne pas susciter l’ennui en demandant à des collaborateurs d’être présent devant leur écran pendant plusieurs heures en les incitant à participer.
Ce défi nous l’avons relevé en plusieurs occasions. Pour le mener à bien nous nous sommes appuyés sur plusieurs fondamentaux du design et de l’animation de temps collectifs. Pour créer notre séminaire avec 600 étudiants et maintenir leur attention pendant deux jours. À distance.
Pour ce qui est des fondamentaux, ils sont assez simples et reposent sur le moteur principal du réacteur : l’envie des participant d’interagir. Cela peut sembler évident, mais le plus souvent lors de l’organisation d’un séminaire la question centrale est souvent celle de l’objectif et des livrables attendus. Cette obsession rassurante du livrable et de la production guide trop souvent la conduite du séminaire, mais en excluant de facto les personnes de l’autre côté de l’écran et sans se poser les questions essentielles :
- Quel est l’état d’esprit de la personne
- Que va leur apporter ce moment collectif
- Quel est l’enjeu de se rassembler
Une question de transformation
Ces questions posées, le deuxième fondamental sur lequel s’appuyer est celui de la trajectoire de ce moment collectif. Quels est la transformation attendue et l’état souhaité du groupe à l’issue de ce moment. Au départ, le groupe s’inscrit dans un contexte, ou chacun se pose des questions, se trouve dans un état d’esprit spécifique. L’enjeu global est de faire tendre ce groupe vers un autre état d’esprit en contribuant au projet collectif, quel qu’il soit. Entre le point de départ et l’arrivée, le groupe doit être transformé par la modification de l’état d’esprit de chacun de ses membres.
La prise en compte de l’élément humain plutôt que l’enjeu de production amènera à penser votre déroulé différemment en enrichissant la réflexion par une définition claire des enjeux. Des enjeux à ne pas confondre avec les objectifs de l’ordre de l’opérationnel. Par exemple, si vous vous fixez comme objectif de produire de nouvelles idées de produits ou service, l’enjeu global sera de « stimuler la créativité ».
Designer votre rencontre
Une fois ce cadrage initial réalisé, reste à Architecturer votre agenda en différentes séquences en évitant les zones de risque et d’ennui. Un point clé est la prise en compte du « flow » , sorte de dynamique collective à activer et entretenir tout au long de votre Event. Comme un escalier, chaque étape suit un séquencement logique et pourrait être, par analogie, comme un escalier. Ici intervient le dosage entre différentes séquences : co-construction, participatives, descendantes, etc… Un mauvais dosage fera basculer le collectif dans les zones d’angoisse défi (trop difficile) ou d’ennui (trop passif).
À ce stade, chaque choix de séquence repose sur 5 principes clés :
- Accessible en lien avec mes compétences
- Impliquant
- Logique pour tendre vers l’objectif
- Apprenant pour la suite du temps collectifs
- Réaliste au regard de l’énergie du groupe
À distance, ces 5 clés sont encore plus cruciales qu’en présentiel, mais dans les deux cas, en suivant un agenda bâtit sur ces principes, à la fin de la journée le collectif est resté impliqué dans un processus l’amenant vers la transformation d’état d’esprit souhaitée.
Le diable est dans les détails
À distance, chaque évènement est subordonné à la loi de Murphy. Pour pallier cette loi, la conception doit prendre en compte quelques éléments de base dont le plus important : verrouiller avec l’IT. Qu’il y ait 10 personnes sur 10 sites distants ou 100 ou 1000 personnes connectées, sans recours en amont à l’IT et à une hotline, il y a de fortes chances pour que les problèmes techniques s’accumulent. La bonne idée est de créer comme nous le faisons systématiquement un canal support pour les personnes en difficulté à se connecter ou pour pallier tout autre problème. Ce canal d’accompagnement est aussi important pour pouvoir échanger à tout moment avec les personnes connectées, par exemple lors d’une activité de groupe. La mobilisation d’une communauté de facilitateurs est importante en fonction de la taille du groupe.
La maîtrise des solutions distancielles par les participants n’est pas assurée. Prenez le temps de faire des ateliers introductifs familiarisant aux fonctionnalités à utiliser lors de votre Event. Intégrez aussi dans votre agenda le temps lié aux connexions et compréhension de la navigation. Il y a toujours de l’inertie au début.
Inévitablement, il peut y avoir des soucis techniques, restez zen cela fait parti du jeu et n’hésitez pas à poursuivre le déroulement principal. Show must go on.
Animer : le cœur du réacteur
L’animation estla principale difficulté. Ici, l’exigence est dans la préparation et la mise en œuvre. Toutefois, il y a quelques recettes pour partir d’un bon pied. À commencer par un agenda rythmé et des consignes claire. Lors des ateliers, les horaires sont intangibles et un time keeper est indispensable. Le tempo entre plénière et sous-groupes virtuels est primordial.
On favorise les petits groupes, au-delà de 6 personnes, il y a fatalement des passagers clandestins, à 4 ou 5, personne ne peut se cacher. La bonne idée est aussi de créer des moments d’échanges entre les groupes pour brasser les idées et points de vue, voir changer les rôles en cours de route. Tout au long de la session, alterner les moments d’activité, d’échanges, de réflexion, d’actions. Ponctuer par des animations de type quiz ou défis sans enjeux. Ne négligez pas les temps de pause, ils sont importants.
Les recettes sont nombreuses, il serait fastidieux de tout évoquer. Mais le principe général repose sur une idée-force : le temps passé doit être vécu comme un tourbillon d’échanges surprenant pour les participants. Soyez audacieux dans l’organisation de vos event.
En abordant correctement les trois fondamentaux du cadrage, de l’architecture global et de l’animation, vous avez de bonnes bases pour réussir un évènement distanciel. Toute la réussite consiste dans un savant dosage de chacun des ingrédients. Pour aller plus loin, nous avons réalisé un retour d’expérience sur un évènement de deux jours consécutifs. Notre principal KPI a été respecté : les participants pas vu le temps passer !