[Interview] « Autant le manager doit avoir la capacité de compréhension de ses enjeux, autant il doit savoir déléguer et responsabiliser des équipes une fois les directions identifiées. »
En se basant sur notre dernière étude sur l’impact de l’intelligence artificielle et de la digitalisation sur le management, nous nous sommes intéressés à la vision qu’ont les managers d’entreprises sur la façon dont ils perçoivent l’évolution de leur rôle dans l’entreprise.
C’est aujourd’hui l’avis de Fabienne BILLAT, manager en Conseil en communication et stratégie numérique chez FYI qui nous intéresse.
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Pour faire connaissance :
- Prénom – Nom : Fabienne Billat
- Fonction : manager en Conseil en communication et stratégie numérique chez FYI
- Vous êtes manager depuis combien d’années : 11 ans
- Vous encadrez directement combien de personnes : 0
Notre enquête révèle que :
90 % des managers constatent une accélération du changement depuis leur prise de fonction, 81 % une augmentation de leur charge de travail, 59 % une demande accrue de reporting, 38 % une plus grande complexité pour gérer les équipes et 36 % pour élaborer le budget ex-aequo avec une plus difficulté accrue de communication.
Selon vous, quelles sont les principales qualités qu’un manager doit posséder et quelles sont celles qu’il doit développer ?
La base est la connaissance de son marché, de ses équipes, de ses collaborateurs (management de proximité). J’écarte volontairement la connaissance du métier, pour privilégier des compétences d’appréhension globale, déterminant les objectifs. J’ajouterais des compétences de leadership, de qualités relationnelles. Autant le manager doit avoir la capacité de compréhension de ses enjeux, autant il doit savoir déléguer et responsabiliser des équipes une fois les directions identifiées. Les managers ont par ailleurs la grande capacité de concevoir sans être opérationnel dans tel ou tel domaine.
Dans une période évolutive technologiquement, les usages se transforment, les activités professionnelles sont en constante évolution : dorénavant, le management doit s’aligner, avoir une approche prospective, capable d’ouverture extérieure, par le réseautage, la communication. Ainsi, la maîtrise du numérique, à travers une veille stratégique sur les réseaux pros, lui permet un regard extérieur et distancié. Cette veille économique peut être réalisée en interne, mais les dirigeants doivent être au faite des résultats, et s’emparer des informations qui concernent son marché concurrentiel.
Comment définiriez-vous un manager augmenté ? A votre avis de quoi (qualité, techno … ) un manager devra avoir besoin pour devenir « augmenté » ?
Je ne suis pas convaincue de la nécessité de connaissances des différentes fonctions. C’est là où se trouve l’humilité du manager : concevoir qu’il ne peut tout savoir. En revanche, déceler chez autrui les apports et les potentialités. Qu’ils soient technologiques, humains, est une grande faculté. Néanmoins, la propension naturelle, notamment dans les PME et ETI, pour les dirigeants, est d’avoir « le nez dans le guidon », sur le terrain, avec un objectif vente/produit.
Le taux de développement des outils à base d’IA pour les managers est encore faible. A votre avis, quelles pourraient en être les causes ? (coûts des solutions, des managers pas assez « technophiles », peur de l’IA, problème d’éthique, de formation … ?)
Plus de la moitié (53%) des décideurs européens prennent au moins une décision commerciale stratégique par jour, mais ils sont rare à utiliser l’intelligence artificielle pour ces prises de décisions. Concrètement, 85% des data collectées par les entreprises ne sont pas exploitées.
Cela enjoint d’avoir des équipes dédiées, voire avec un directeur des données. Des data scientists l’affirment : la data science ne doit pas être que l’affaire des data scientists ! Elle gagne pourtant en popularité depuis quelques mois.
Ce retard en matière d’utilisation des data révèle la carence en formation technique. Le recrutement des talents, s’avère une difficulté. Je suis aussi partisane d’un recrutement diversifié autant que possible. Puis de l’établissement d’une charte éthique, concernant toutes les étapes de la mise en œuvre de l’intelligence artificielle. Les freins ne sont pas majoritairement d’ordre budgétaire, mais la multitude des choix à opérer en ce domaine, complexifie inéluctablement le process. Or, il y a la nécessité d’agir rapidement, et d’obtenir plus de data.