Les cinq commandements de la relation grands groupes / start-up
Découvrez le cas précurseur sur le programme French IoT dirigé par Vanessa Chocteau, lancé par le groupe La Poste en 2015.
L’Atelier BNP Paribas, l’Airport Start-up Day par ADP, Lafayette Plug and Play en partenariat avec Carrefour, lancement de Station F… Les programmes d’accélération ou de co-innovation entre grands groupes et start-up se multiplient ces derniers mois, et sont en passe de devenir un « must have » des directions innovations et transformation digitale. Longtemps cloisonnés, start-up et grands groupes se rapprochent pour créer de la valeur en commun. Mais quelle valeur justement ? Pour éclairer les conditions nécessaires à la création de bénéfices durables pour les deux parties, Axys Consultants s’est penché sur un cas précurseur modèle : le programme French IoT dirigé par Vanessa Chocteau, lancé par le groupe La Poste en 2015.
French IoT : un programme connecté aux enjeux stratégiques du Groupe La Poste
L’une des clés du succès du programme French IoT, porté par la filiale DOCAPOST dédiée à la transformation numérique, c’est son intégration à l’agenda stratégique du groupe. « Nous avions identifié l’IoT comme un sujet émergent lors du CES de Las Vegas de 2015. C’était à la fois une menace, mais aussi une opportunité pour le Groupe de venir proposer de nouveaux services et de renouveler la relation client. Le lancement du programme French IoT est venu en support du développement de la plateforme Hub Numérique, afin d’enrichir l’offre d’applications disponibles » explique Vanessa Chocteau, Directrice du programme French IoT. Pour Paul Strippe, Directeur général d’Axys Consultants, cette genèse du programme explique en partie son succès : « ce qui garantit la pérennité d’un partenariat entre des start-up et un grand groupe, c’est son intégration aux enjeux stratégiques du groupe. Lancer un tel programme doit répondre à des objectifs clairs : ouvrir de nouveaux marchés, explorer de nouvelles technologies, développer des services ou produits innovants…. Un partenariat avec des start-up doit permettre de booster la performance du groupe ».
Directions, territoires, partenaires… ouvrir les portes et les fenêtres !
Lancé au début des initiatives comme la French Tech, le projet French IoT faisait partie des premiers programmes d’accélération menés par de grandes entreprises et représentait un vrai pari pour le groupe. Pour DOCAPOST, le défi était avant tout de mobiliser autour du projet, afin notamment d’attirer des candidatures de qualité. Ainsi, la filiale du Groupe La Poste a porté le programme avec 5 régions pionnières la première année, pour bénéficier de leur fine connaissance du territoire et des innovations existantes. Au-delà des ressources internes, La Poste a également fait le choix d’ouvrir le jury de sélection et le programme à d’autres grands partenaires, en adoptant une logique collaborative. Ainsi, les pôles territoriaux de la French Tech, ou de grands groupes comme la RATP, BNP Paribas, Legrand ou encore Malakoff Médéric ont pu être intégrés, permettant de maximiser l’écho du programme et d’additionner les expertises.
Résultat : des équipes internes engagées dès la phase de promotion du programme, prêtes à accueillir les lauréats, sensibilisés aux enjeux d’innovation. Plus de 300 start-up ont candidaté la première année, démontrant l’appétit de ces acteurs pour un programme comme celui de la French IoT, et fournissant une occasion rêvée pour le Groupe de travailler en transversalité et de créer des relations avec des partenaires externes.
Un programme « industrial by design »
Catspad, le distributeur de croquettes connectées, My Jomo, le smart video badge, ou encore Qarnot, les premiers radiateurs utilisant des microprocesseurs comme source de chaleur… alors que la 4ème édition vient d’être lancée, le programme French IoT a déjà quelques belles histoires au compteur. Certains des produits développés ont d’ailleurs rejoint l’offre de services AtWork lancée par le Groupe, qui combine nouveaux modes de travail et objets connectés. La clé du succès pour Vanessa Chocteau ? Un process dont le but assumé est d’intégrer en fin de parcours les start-up aux offres distribuées par le Groupe. Pour assurer cet objectif, la French IoT a identifié trois principaux enjeux : le choix de start-up aux business models robustes et capables de scaler, l’exigence du programme d’accompagnement, la création de parcours de tests permettant de développer des projets pilotes. Pour Paul Strippe, l’un des facteurs clé de succès de tels programmes est d’être « industrial by design », c’est-à-dire de penser dès leur conception les points de passages obligatoires permettant d’associer les jeunes pousses aux projets du groupe. « Les grands groupes ont un niveau d’exigence élevé. Créer de la valeur avec des start-up, cela revient à ne pas transiger avec ces exigences, mais les sélectionner, les entraîner et les tester pour leur permettre de franchir ces haies. »
Organiser une pollinisation culturelle réciproque
La French IoT a organisé le dialogue entre ces partenaires pour tirer le maximum de valeur, en créant des espaces de rencontres physiques, des meetup entre les équipes La Poste et les start-up, en mobilisant des ressources « bilingues ». Si la tâche peut paraître ardue, pour Vanessa Chocteau « grands groupes et start-up parlent finalement le même langage, ce sont des entrepreneurs, avec l’envie de développer du business, des projets, de créer de la valeur ». Cet échange culturel, qui est l’un des bénéfices les plus importants d’un programme d’accélération, doit se faire selon un principe de réciprocité. Selon Paul Strippe « On loue souvent les capacités d’innovation et de disruption des start-up, qui incitent les groupes historiques à porter un œil neuf sur leurs habitudes, à hacker leurs processus pour accélérer. De l’autre côté, ce que les start-up doivent pouvoir entendre des grands groupes c’est le niveau d’exigence, la volonté non pas seulement de faire, mais de faire bien, de faire durablement ».
Make them shine !
Accueillir des start-up dans une logique de co-innovation, c’est enfin chercher à les mettre en lumière pour accélérer leur développement. Au-delà du programme d’accompagnement, la French IoT ouvre ainsi de belles portes, en emmenant les meilleurs projets au CES de Las Vegas, ou en les mettant en relation avec clients et partenaires du Groupe. Ainsi, Myxyty, la start-up développant la première enceinte domotique multiroom et membre de la deuxième promotion French IoT a conclu une série de partenariats de premier rang tels qu’IBM, Sigfox ou encore le moteur de recherche Qwant. Faire briller « ses start-up » partenaires, accepter de les mettre sur le devant de la scène, leur ouvrir des portes est aussi l’une des clés du succès de tels programmes, et de la capacité à en retirer des bénéfices mutuels.
Après quatre années d’existence, le programme French IoT a permis au Groupe La Poste de se positionner comme l’un des pionniers non seulement des objets connectés, mais également de la relation entre grands groupes et start-up. Plus qu’un effet de mode, c’est en connectant ce programme à ses enjeux stratégiques, en repoussant ses frontières, en poussant les start-up à atteindre les niveaux d’exigences permettant de s’intégrer au groupe, en organisant des échanges réciproques et en valorisant ses partenaires que le Groupe a pu tirer des bénéfices durables.