Définir son besoin de transformation : l’alpha et l’omega de la réussite
S’engager dans une transformation nécessite de se préparer à changer d’état, à aller d’un point A jugé insatisfaisant vers un point B meilleur, idéal. Dans un environnement fortement volatil, cela ne s’improvise pas et ne s’impose pas forcément non plus.
La phase de préparation et de qualification du besoin de transformation devient critique et sa bonne exécution est une condition nécessaire aux succès ultérieurs : elle permettra de dessiner une trajectoire et d’anticiper les inévitables difficultés inhérentes à chaque projet en se donnant les moyens d’évaluer les impacts sur l’ensemble des populations impactées par le changement.
Une transformation est un voyage et il faut savoir d’où l’on part
Il est tout d’abord nécessaire de déterminer précisément l’état du point A, comprendre ses faiblesses mais aussi ses atouts, c’est-à-dire mesurer le niveau de maturité digitale de l’entreprise sur la fonction achats.
Cela passe bien sûr par l’analyse exhaustive des processus en place et des solutions qui les soutiennent et permet de définir quels sont les points sur lesquels il est réellement nécessaire et prioritaire de s’améliorer.
Cela nécessite aussi de s’interroger sur la culture de l’entreprise, et en particulier le type d’organisation achats en place et sa pertinence en se posant par exemple les questions suivantes :
- Le mode d’organisation des achats répond-il bien aux enjeux, aux ambitions & au positionnement de la fonction au sein de l’entreprise ?
- L’articulation des portefeuilles d’achats (dont la segmentation des catégories) correspond-elle toujours au marché réel ?
- Les acteurs de la fonction achats sont-ils suffisamment experts de leurs segments ?
- Des outils & méthodes achats ?
On pourra alors clairement définir les enjeux de la transformation et définir en quoi elle peut aider la Direction des Achats à contribuer plus fortement à la performance de l’entreprise.
Il est plus facile de monter que de descendre
L’une des erreurs fréquemment commises dans la construction d’une trajectoire est de sous-estimer l’effort de changement en ne pensant que transformation positive.
Il est facile d’identifier les points sur lesquels on va s’améliorer et faire accepter la disparition d’un irritant puisque c’est le sens même d’une transformation. Il est plus difficile et pourtant critique d’anticiper les régressions ponctuelles ou locales apportées par la transformation – soit parce que pour le plus grand bien de tous on sait que l’on devra mécontenter certains, soit tout simplement parce ces régressions n’apparaitront qu’en cours de transformation. Or, ce sont les régressions, fonctionnelles ou de productivité, qui sont à l’origine d’une grande partie de la résistance au changement. Sans obérer dans le propos, l’impact du changement des habitudes.
Il est ainsi capital à ce stade de savoir également reconnaitre ses points forts, objectivement, afin de mieux les préserver et éviter de perdre à l’avenir ce qui a été chèrement acquis.
Mesurer son altitude
S’il est simple de connaitre son environnement immédiat, il est plus compliqué de savoir où l’on se situe par rapport au monde extérieur si l’on n’a jamais voyagé.
Le benchmark est, parmi les solutions disponibles pour bien se situer, celle qui est la plus immédiate mais son efficacité dépend de deux prérequis : premièrement définir des indicateurs clairs que l’on sait pouvoir mesurer dans sa propre organisation – taux de couverture achat par catégorie, nombre d’ETP par montant de dépense ou par volume de factures… et deuxièmement identifier les organisations comparables et également mesurables – secteurs d’activité ou marchés. On pourra via cet outil non pas se forger des convictions mais plutôt confirmer ou infirmer la perception de sa propre performance.
Enfin, qui dit transformation digitale dit technologie, SI achats, innovation. A ce stade, il est utile de comprendre quels sont les moyens disponibles sur le marché : proposition de valeur, degré de diffusion sur le marché, tendances et perspectives mais aussi complexité et délai de mise en œuvre. L’objectif ici n’est pas de choisir d’emblée une solution ou une architecture mais de savoir ce que le marché est en mesure d’offrir à court, moyen et long terme, à quel niveau de prix et in fine atteindre les objectifs préalablement définis pour répondre à l’ambition du projet de transformation.
Choisir sa destination en toute connaissance de cause
Ce n’est qu’une fois évalué le niveau de maturité achats actuel et compris l’environnement technologique disponible que l’on peut définir une direction stratégique couplée à des objectifs plus précis à même de répondre aux enjeux de transformation. Cela peut bien sûr inclure la mise en œuvre de solutions digitales, mais aussi un ajustement de l’organisation et de ses modes de fonctionnement. C’est d’ailleurs la plupart du temps une combinaison intelligente des trois dimensions qui permettra d’aider au mieux l’Entreprise à améliorer sa performance et son efficacité globale et in fine atteindre ses objectifs.
Choisir c’est ici à la fois être ambitieux – la destination doit pouvoir embarquer et fédérer – mais aussi rester pragmatique : il n’est ni possible ni recommandé de partir tous azimuts. Il est clé pour la suite de projet de savoir définir et expliquer clairement ses priorités et donc être capable de retarder, voire abandonner, un besoin non critique si sa prise en compte met en danger le cœur de la transformation ou s’écarte de son cap.
Enfin, ce choix s’appuiera sur une analyse aussi factuelle, chiffrée et transverse que possible du coût – financier, mais aussi organisationnel, écologique, social – des risques et des gains attendus – là aussi financiers mais pas uniquement – à la suite de cette transformation.
Dessiner son parcours et prendre le temps de la découverte
Pour conclure, on pourra commencer à envisager le voyage sous une forme plus pratique et entamer la préparation : identifier ses compagnons de route, s’accorder sur une trajectoire et valider son budget, l’écueil ici étant de vouloir aller trop vite et brûler les étapes.
Une transformation prend du temps parce qu’elle doit être en cohérence avec la capacité des populations impactées à comprendre, à accepter et à y participer. Les seuls critères de mise en œuvre technologique ne suffisent pas à en déterminer le succès.
Ceci est d’autant plus vrai que, durant le temps de la transformation, en particulier dans le contexte volatil qui est le nôtre, il est probable que des aléas surviendront ou que des changements de direction pourront être pris. Il faudra alors expliquer, convaincre et accompagner l’ensemble des voyageurs en adaptant le parcours aux conditions opérationnelles du voyage, tout en veillant évidemment à garder le cap et ne jamais oublier la destination choisie au départ.
Maëva Signor, Manager performance et management des achats – Axys Consultants